Troisième épisode de ma série estivale.
Je suis descendu
à la station Denfert-Rochereau. Le nom me plaisait bien, il sonnait comme celui
d’un savoureux gâteau. J’ai suivi la foule. Des paires de pieds par centaines trépignants,
sautillants, traînants, devant moi, derrière moi, autour de moi. Je commençais
sérieusement à regretter d’avoir quitté la verrière. C’était un défilé qui n’en
finissait pas aux accords d’un violon égrenant un air frénétique. Au bout d’un long couloir, à la croisée des
chemins, les gens me bousculaient; ils ne me voyaient pas. Ils semblaient juste
obéir à un rythme qui leur aurait dit : en retard, vous êtes en retard (J’avais
déjà entendu cette parole quelque part). Je réfléchissais à tout ça tout en
hésitant sur la direction à prendre lorsque j’ai entendu une voix retentir au
milieu du brouhaha : « Vous ! Vous ! » Un homme vêtu
tout en noir et à la chevelure bicolore : noire du sommet jusqu’au milieu
de la tête et blanche en dessous pointait le doigt dans ma direction. Je le
scrutais pour essayer de voir l’humain qu’il essayait d’interpeller. Mes pattes
ont presque été piétinées pendant ce temps-là. Il a soudain à nouveau répété : « Vous !
Vous ! » J’ai jeté un coup d’œil en arrière, sur les côtés mais parmi
tous ces gens, ces mille pieds aucun ne semblait vraiment concerné. Je me suis
figé lorsque j’ai entendu soudain : « Oui, vous qui vous êtes arrêté
à la croisée des chemins, oui, vous jeune être, en proie au doute. »
J’étais
embarrassé alors j’ai levé la tête vers le plafond mais, à part quelques chewing-gums
qui y étaient collés, je n’arrivais pas à envisager que quelqu’un s’adresse à
moi. J’ai voulu lui répondre quelque chose mais les mots qui se bousculaient
dans mon esprit se sont pétrifiés. C’était la première fois que j’essayais de
parler à un humain et qu’un humain me remarquait et voulait communiquer avec
moi. Il n’a pas eu l’air d’être contrarié par mon silence. Je me suis rappelé
de ce que ma mère m’avait dit au sujet des humains ; ils peuvent
s’emporter pour un rien et nous pourchasser surtout les plus petits d’entre
eux. Fais attention à eux mine de rien.
Au contraire, celui-ci n’avait pas l’air de m’être hostile. Comme il a vu sans
doute que je ne bougeais pas et que je n’arrivais toujours pas à parler, il a
sorti un harmonica et a joué, ce qui lui a valu quelques pièces de monnaie, puis
il m’a dit : « Suivez-moi, on ne s’entend pas ici. » Il m’a fait
un signe de la main et je suis parti derrière lui.
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